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Il est
des moments où l’Histoire de ce football que l’on aime
tant prête à d’innombrables et interminables commentaires.
Commentaires teintés de scepticisme…d’interrogations
diverses…voire même de doute ?
Commentaires sans fin sur le résultat brut d’une simple partie
de ballon disputée il y’a fort longtemps.
Cela à beau remonter à 28 ans, la suspicion entourera toujours
le déroulement du dernier match du groupe B (Brésil, Pérou,
Argentine, Pologne) lors du Mundial 1978.
Que n’a-t-on raconté sur Ramon « Chupete » Quiroga
?

Le portier Péruvien fraîchement naturalisé avant le
Mundial pour pouvoir disputer la compétition…est Argentin
d’origine, natif de Rosario même, où va se dérouler
ce match.
Il subira l’opprobre, sera constamment montré du doigt et
sera même agressé à la descente d’avion de la
sélection Péruvienne à son retour à Lima.
Ainsi il rejoindra la galaxie des gardiens martyrs dont le chantre est
pour la nuit des temps Moacir «Poulet» Barbosa, le n°
1 de la sélection Brésilienne de 1950.*
En cette froide soirée du 21 juin, lorsque les deux équipes
pénètrent sur la pelouse du Rosario Central, les données
sont très claires.
L’Argentine doit IMPERATIVEMENT gagner par 4 buts d’écart
pour pouvoir distancer l’ennemi héréditaire qu’est
le Brésil et ainsi disputer SA finale 4 jours plus tard devant
son « cher Général Videla » au Monumental de
Buenos Aires.
En effet, juste avant le coup d’envoi, le goal-average des Brésiliens,
qui ont joué 3H00 auparavant – ben voyons ??- contre les
Polonais (3-1), affiche + 5 en leur faveur…alors que celui de la
bande à Menotti n’est que de + 2.
Pas besoin d’être un 1er de la classe « bien dégagé
autour des oreilles » en maths pour comprendre l’équation
qu’ils doivent résoudre en 90 minutes.
Ah, que ressurgisse dans mes neurones envapées le générique
du Télé-Foot Cangionisé et ses « papelitos
» qui ont nourris mes yeux-buvards de tant d’http://footnostalgie2.free.fr/images restées
depuis au fin fond de ma boite noire…

Et pourtant…
Pourtant ce que le commun des mortels retiendra de ce match, c’est
le score final (6-0) net et sans bavure en faveur des bleus et blancs
emmenés par un superbe Mario Kempes.
Mais qui se souvient du début de la rencontre ?
A l’instant où M.Wurtz, l’arbitre français,
donne le coup d’envoi, on ne donne pas cher de la peau de timides
Péruviens qui sont restés hors sujet lors du second tour.
Battus par les Brésiliens (3-0) et les Polonais (1-0), ils n’avaient
plus aucune prétention avant ce dernier match, si ce n’est
de quitter la tête haute ce Mundial qu’ils avaient emballé
au 1er tour avec de forts jolis succès contre les Ecossais (3-1)
et les Iraniens (4-1) sous l’impulsion d’un excellent Cubillas
auteur de 5 buts en deux matchs…

Les Péruviens passèrent à côté de quelque
chose d’énorme…
Dès les premières minutes, ils se contentent de contenir
les assauts désordonnés d’Argentins qui ne savent
pas par quels bouts prendre les commandes.
D’ailleurs, ce sont les Péruviens qui ouvrent les hostilités
en déclenchant le 1er tir de la partie.
Une certaine fébrilité règne néanmoins dans
leur défense articulée autour de Chumpitaz.
Mais ils tiennent…ils tiennent.
Sur son banc, Luis César « El Flaco » Menotti est décomposé
et se perd dans la fumée de ses cigarettes qu’il grille nerveusement
l’une après l’autre.
Et le sort du match…que dis-je ? LE SORT DE L’HISTOIRE eût
pu être changé à jamais au bout de seulement un quard’heure
de jeu.
En effet, à la 11ième minute, Munante grille la politesse
à Tarantini sur son aile droite, se présente devant Fillol…et
tire sur le poteau.
Quelques instants après, c’est au tour d’Oblitas de
débouler sur son aile gauche et de trop croiser son tir…en
oubliant lamentablement Cubillas, seul…trop seul au point de pénalty.
Et comme si cela ne suffisait pas, le même Oblitas tire encore de
peu à côté de la cage dans la minute suivante…
Hé ho, amnésiques du monde entier, si vous me lisez, sachez
que tout s’est joué à ce moment-là !!!
NON, les Péruviens ne se sont pas présentés en victime
expiatoire.
NON, Ramon Quiroga, n’est pas à incriminer sur cette déroute.
Signé FRQ…Front de Réhabilitation Quiroguienne !
Le public Argentin, déjà frigorifié par leur hiver
local…c’est vraiment incroyable çà !!
Nous autres Européens, la période juin-juillet signifie
chemisettes, soleil, été…chez eux, c’est le
FROID !!!!
…euh…qu’est-ce que je disais déjà ?
Ah oui, on jactait de foot, c’est çà, hein ?
Le public Argentin donc…déjà frigorifié, sentant
qu’ils viennent sans doute d’échapper à une
catastrophe nationale se met en branle et allument ses « ARGENTINA
! ARGENTINA » gutturaux…sous « l’œil bienveillant
» de son triste sire Jorge Rafael Videla.
Et c’est Mario Kempes qui sonne la révolte.
Le beau Mario s’appuie sur un partenaire et s’en va battre
Quiroga-qui n’a rien eu à faire depuis le début- à
l’entrée des six mètres.
GGGGGGOOOOAAAAALLLLLLL !!!!!!!!

A ce moment précis, la « séleccion » rentre
dans le match.
Tir sur le poteau de Luque.
Re-tir sur la barre transversale d’Ortiz, deux minutes plus tard.
Il faut attendre la 35ième minute pour voir le premier arrêt
du portier Péruvien sur une tête peu appuyée de …Kempes,
le véritable métronome de son équipe.
Tout en appuyant sur le champignon, les Argentins s’exposent aux
contres des Péruviens.
Y’en a toujours 4 ou 5 qui giclent à chaque contre-attaque.
Mais cette fois, la « grinta » se trouve chez les gauchos.
Sur un centre qui passe devant le but vide, Bertoni récupère
la balle à droite de la surface et se fait faucher…sans que
Robert « Nijinsky »Wurtz n’y trouve à redire.

Sur une balle balancée dans la surface, notre ami Ramon s’interpose
dans les airs à Bertoni qui la convoitait.
Luque nous gratifie d’un petit numéro de jonglage à
l’entrée de la surface de réparation et adresse un
tir au ras du poteau.
Passarella réclame encore un penalty, suite à une poussée
dans le dos de Chumpitaz…pour une fois que le futur « tendre
coiffeur-sélectionneur » en est la victime… **
Nouveau tir de Larrosa mais…parade de Ramonnnnnn….

La pression s’accentue.
Et ce qui devait arriver…arriva.
Peu avant la mi-temps, sur un corner de Bertoni, Alberto Tarantini catapulte
le ballon de la tête au fond des filets Péruviens et porte
le score à 2-0 en faveur des Argentins.
Petit détail qui aura son importance : les Argentins sont les premiers
à revenir sur le terrain.
Ils attendent pendant 2 longues minutes la réapparition de leurs
adversaires.
Que n’a-t-on raconté sur cet intermède ?
Que s’est-il passé exactement à la mi-temps dans les
vestiaires Péruviens ?
Nul ne le sait !
Quoiqu’il en soit, c’est avec une rage décuplée
que les compagnons d’Olguin attaquent cette seconde partie du match.
S’il fallait encore démontrer que les Péruviens ont
sincèrement joué le jeu, la preuve en est avec le 1er tir
juste au-dessus de la cage de Fillol.

Mais une fois de plus, tout va basculer en l’espace de quelques
minutes.
Velasquez commet une faute sur Bertoni.Sur le coup franc, la balle parvient
à Kempes-qui s’aide sans doute un peu de sa mimine- et trompe
à bout portant le gardien adverse.

Sur l’engagement, nouvelle récupération des Argentins.
La balle arrive sur la tête de Luque- en position de hors-jeu flagrant-
qui la propulse dans le but vide.

La seconde mi-temps a repris depuis seulement 5 minutes et l’Argentine
(et tout un peuple derrière elle) est au Paradis…son Paradis…
La suite est anecdotique. Jeu beaucoup plus musclé. Tacles violents.
Gestes répréhensibles.
Les Péruviens qui tentent de limiter la casse.Les Argentins qui
veulent jouer, jouer et toujours jouer.
Deux nouveaux buts signés Luque et Houseman, qui vient de rentrer
sur le terrain, clôtureront le score.

Oui, le contexte particulier de ce match a généré
moult commentaires.
Certes, ce serait vraiment verser dans la facilité que de croire
qu’il y’a eu un quelconque arrangement.
Rien à voir avec un abject Autriche-RFA du Mundial 1982 ou un Espagne-Malte
(12-1) qualificatif pour l’Euro 1984 en France.
MAIS au vu du déroulement du match, ET EN TOUTE OBJECTIVITE, qui
aurait l’outrecuidance d’affirmer que les joueurs de l’entraîneur
Calderon aient pu « lever le pied » comme l’accusent
leurs détracteurs depuis bientôt 28 ans ?
L’équipe Péruvienne se trimballa une enclume d’infamie
et ne s’en est à ce jour jamais débarrassée.
Ce soir-là, l’équipe Argentine, emmenée par
un Mario Kempes étincelant, était simplement au-dessus de
son adversaire.

Les Péruviens jouèrent avec leurs armes, ne manquant jamais
d’inquiéter Fillol.
Cubillas, son fer de lance, fut mis sous l’éteignoir par
l’arrière-garde Argentine.
QUIROGA NE PUT ABSOLUMENT RIEN FAIRE SUR LES 6 BUTS ENCAISSES.
D’AILLEURS, AVANT LA RENCONTRE, RAMON PENSAIT MEME NE PAS JOUER
CE MATCH ET SON ENTRAINEUR DUT INSISTER POUR QU’IL LE FASSE.
Son honneur bafoué, Ramon Quiroga dut s’expliquer dans une
lettre adressée à la presse les jours suivants.
Lettre, qui succinctement disait ceci : « L’Argentine a gagné
parce que c’est une équipe forte et qui nous a dominée
pendant toute la rencontre.Le Pérou a joué avec le même
engagement que dans les parties précédentes, mais il a trouvé
en face de lui un adversaire qui avançait sans cesse et jouait
le match de sa vie.Dites-moi QUELLE EQUIPE aurait pu leur résister
?
Je suis fier d’avoir obtenu la nationalité Péruvienne
et que l’on m’ait témoigné la confiance suffisante
pour garder les buts de la sélection. »
Oui, Ramon, fais fi des racontars de toutes sortes sur ton compte.
Ignore-les.
Relègue donc dans les limbes du silence le sceau de l’outrage
apposé par les bien-pensants.
Reste ce gardien un peu « loco » qui, bas baissés,
s’en va dire un p’tit bonjour à Lato, le Polonais,
au milieu de terrain lors d’un certain Pologne-Pérou joué
précédemment.
De toute façons, tu retrouveras ton honneur puisque 4 ans plus
tard, tu garderas toujours les cages Péruviennes…et cette
fois, c’est Lato et ses copains qui se régaleront…***
Le peuple Argentin pouvait festoyer toute la nuit, il allait disputer
SA finale…mais çà, Les Folles de Mai s’en foutent
éperdument…****
José Mendizabal
*
Barbosa, le gardien de but du Brésil fut considéré
comme le principal responsable de la défaite au Maracana (1-2)
en 1950, qui verra l’Uruguay devenir championne du monde.
Il traînera cela comme un boulet toute sa vie durant et ce jusqu'à
sa mort en 2000.
**
Daniel Passarella fut entraineur de l’Argentine lors du Mondial
1998. Il imposa une discipline de fer à son groupe.Signe de son
despotisme, il demanda à ses joueurs …de porter le cheveu
court !!! Sous prétexte que cela nuisait à leur concentration
pendant un match, car trop occupés qu’ils étaient
à se recoiffer…ce à quoi Diégo Maradona lui
rétorqua que s’ils se grattaient les couilles, ils faudraient
leur couper aussi ??
***
Lors de Pologne-Pérou (1-0), Lato l’attaquant Polonais s’échappa
vers le but Péruvien…et trouva Quiroga venu à sa rencontre
…au milieu de terrain, qui pour l’annihiler, le ceintura.
4 ans plus tard, lors d’une nouvelle confrontation entre les 2 pays
au Mundial en Espagne, Lato lui marquera 1 but sur les 5 concédés
ce jour-là par les Péruviens (Pologne-Pérou : 5-1)
****
Suite à la prise de pouvoir de la Junte militaire du Général
Vidéla, une dictature s’instaure en Argentine.Pouvoir féroce,
qui met fin à toute démocratie et abat sur le pays une répression
brutale.Des pères de famille, des fils « disparaissent »
du jour au lendemain.Les mères et les femmes des disparus manifesteront
toutes les semaines sur la place de Mai, à Buenos Aires, en réclamant
la vérité sur leur sort…Magnifique et ô combien
pathétique combat contre l’asservissement d’un peuple…
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