Le portier Péruvien fraîchement naturalisé avant le Mundial pour pouvoir disputer la compétition…est Argentin d’origine, natif de Rosario même, où va se dérouler ce match.
Il subira l’opprobre, sera constamment montré du doigt et sera même agressé à la descente d’avion de la sélection Péruvienne à son retour à Lima.
Ainsi il rejoindra la galaxie des gardiens martyrs dont le chantre est pour la nuit des temps Moacir «Poulet» Barbosa, le n° 1 de la sélection Brésilienne de 1950.*
En cette froide soirée du 21 juin, lorsque les deux équipes pénètrent sur la pelouse du Rosario Central, les données sont très claires.
L’Argentine doit IMPERATIVEMENT gagner par 4 buts d’écart pour pouvoir distancer l’ennemi héréditaire qu’est le Brésil et ainsi disputer SA finale 4 jours plus tard devant son « cher Général Videla » au Monumental de Buenos Aires.
En effet, juste avant le coup d’envoi, le goal-average des Brésiliens, qui ont joué 3H00 auparavant – ben voyons ??- contre les Polonais (3-1), affiche + 5 en leur faveur…alors que celui de la bande à Menotti n’est que de + 2.
Pas besoin d’être un 1er de la classe « bien dégagé autour des oreilles » en maths pour comprendre l’équation qu’ils doivent résoudre en 90 minutes.
Ah, que ressurgisse dans mes neurones envapées le générique du Télé-Foot Cangionisé et ses « papelitos » qui ont nourris mes yeux-buvards de tant d’http://footnostalgie2.free.fr/images restées depuis au fin fond de ma boite noire…
Et pourtant…
Pourtant ce que le commun des mortels retiendra de ce match, c’est le score final (6-0) net et sans bavure en faveur des bleus et blancs emmenés par un superbe Mario Kempes.
Mais qui se souvient du début de la rencontre ?
A l’instant où M.Wurtz, l’arbitre français, donne le coup d’envoi, on ne donne pas cher de la peau de timides Péruviens qui sont restés hors sujet lors du second tour.
Battus par les Brésiliens (3-0) et les Polonais (1-0), ils n’avaient plus aucune prétention avant ce dernier match, si ce n’est de quitter la tête haute ce Mundial qu’ils avaient emballé au 1er tour avec de forts jolis succès contre les Ecossais (3-1) et les Iraniens (4-1) sous l’impulsion d’un excellent Cubillas auteur de 5 buts en deux matchs…
Les Péruviens passèrent à côté de quelque chose d’énorme…
Dès les premières minutes, ils se contentent de contenir les assauts désordonnés d’Argentins qui ne savent pas par quels bouts prendre les commandes.
D’ailleurs, ce sont les Péruviens qui ouvrent les hostilités en déclenchant le 1er tir de la partie.
Une certaine fébrilité règne néanmoins dans leur défense articulée autour de Chumpitaz.
Mais ils tiennent…ils tiennent.
Sur son banc, Luis César « El Flaco » Menotti est décomposé et se perd dans la fumée de ses cigarettes qu’il grille nerveusement l’une après l’autre.
Et le sort du match…que dis-je ? LE SORT DE L’HISTOIRE eût pu être changé à jamais au bout de seulement un quard’heure de jeu.
En effet, à la 11ième minute, Munante grille la politesse à Tarantini sur son aile droite, se présente devant Fillol…et tire sur le poteau.
Quelques instants après, c’est au tour d’Oblitas de débouler sur son aile gauche et de trop croiser son tir…en oubliant lamentablement Cubillas, seul…trop seul au point de pénalty.
Et comme si cela ne suffisait pas, le même Oblitas tire encore de peu à côté de la cage dans la minute suivante…
Hé ho, amnésiques du monde entier, si vous me lisez, sachez que tout s’est joué à ce moment-là !!!
NON, les Péruviens ne se sont pas présentés en victime expiatoire.
NON, Ramon Quiroga, n’est pas à incriminer sur cette déroute.
Signé FRQ…Front de Réhabilitation Quiroguienne !
Le public Argentin, déjà frigorifié par leur hiver local…c’est vraiment incroyable çà !!
Nous autres Européens, la période juin-juillet signifie chemisettes, soleil, été…chez eux, c’est le FROID !!!!
…euh…qu’est-ce que je disais déjà ?
Ah oui, on jactait de foot, c’est çà, hein ?
Le public Argentin donc…déjà frigorifié, sentant qu’ils viennent sans doute d’échapper à une catastrophe nationale se met en branle et allument ses « ARGENTINA ! ARGENTINA » gutturaux…sous « l’œil bienveillant » de son triste sire Jorge Rafael Videla.
Et c’est Mario Kempes qui sonne la révolte.
Le beau Mario s’appuie sur un partenaire et s’en va battre Quiroga-qui n’a rien eu à faire depuis le début- à l’entrée des six mètres.
GGGGGGOOOOAAAAALLLLLLL !!!!!!!!
A ce moment précis, la « séleccion » rentre dans le match.
Tir sur le poteau de Luque.
Re-tir sur la barre transversale d’Ortiz, deux minutes plus tard.
Il faut attendre la 35ième minute pour voir le premier arrêt du portier Péruvien sur une tête peu appuyée de …Kempes, le véritable métronome de son équipe.
Tout en appuyant sur le champignon, les Argentins s’exposent aux contres des Péruviens.
Y’en a toujours 4 ou 5 qui giclent à chaque contre-attaque.
Mais cette fois, la « grinta » se trouve chez les gauchos.
Sur un centre qui passe devant le but vide, Bertoni récupère la balle à droite de la surface et se fait faucher…sans que Robert « Nijinsky »Wurtz n’y trouve à redire.
Sur une balle balancée dans la surface, notre ami Ramon s’interpose dans les airs à Bertoni qui la convoitait.
Luque nous gratifie d’un petit numéro de jonglage à l’entrée de la surface de réparation et adresse un tir au ras du poteau.
Passarella réclame encore un penalty, suite à une poussée dans le dos de Chumpitaz…pour une fois que le futur « tendre coiffeur-sélectionneur » en est la victime… **
Nouveau tir de Larrosa mais…parade de Ramonnnnnn…
La pression s’accentue.
Et ce qui devait arriver…arriva.
Peu avant la mi-temps, sur un corner de Bertoni, Alberto Tarantini catapulte le ballon de la tête au fond des filets Péruviens et porte le score à 2-0 en faveur des Argentins.
Petit détail qui aura son importance : les Argentins sont les premiers à revenir sur le terrain.
Ils attendent pendant 2 longues minutes la réapparition de leurs adversaires.
Que n’a-t-on raconté sur cet intermède ?
Que s’est-il passé exactement à la mi-temps dans les vestiaires Péruviens ?
Nul ne le sait !
Quoiqu’il en soit, c’est avec une rage décuplée que les compagnons d’Olguin attaquent cette seconde partie du match.
S’il fallait encore démontrer que les Péruviens ont sincèrement joué le jeu, la preuve en est avec le 1er tir juste au-dessus de la cage de Fillol.
Mais une fois de plus, tout va basculer en l’espace de quelques minutes.
Velasquez commet une faute sur Bertoni.Sur le coup franc, la balle parvient à Kempes-qui s’aide sans doute un peu de sa mimine- et trompe à bout portant le gardien adverse.
Sur l’engagement, nouvelle récupération des Argentins. La balle arrive sur la tête de Luque- en position de hors-jeu flagrant- qui la propulse dans le but vide.
La seconde mi-temps a repris depuis seulement 5 minutes et l’Argentine (et tout un peuple derrière elle) est au Paradis…son Paradis…
La suite est anecdotique. Jeu beaucoup plus musclé. Tacles violents. Gestes répréhensibles. Les Péruviens qui tentent de limiter la casse.Les Argentins qui veulent jouer, jouer et toujours jouer.Deux nouveaux buts signés Luque et Houseman, qui vient de rentrer sur le terrain, clôtureront le score.
Oui, le contexte particulier de ce match a généré moult commentaires.
Certes, ce serait vraiment verser dans la facilité que de croire qu’il y’a eu un quelconque arrangement.
Rien à voir avec un abject Autriche-RFA du Mundial 1982 ou un Espagne-Malte (12-1) qualificatif pour l’Euro 1984 en France.
Mais au vu du déroulement du match, et en toute objectivité, qui aurait l’outrecuidance d’affirmer que les joueurs de l’entraîneur Calderon aient pu « lever le pied » comme l’accusent leurs détracteurs depuis bientôt 28 ans ?
L’équipe Péruvienne se trimballa une enclume d’infamie et ne s’en est à ce jour jamais débarrassée.
Ce soir-là, l’équipe Argentine, emmenée par un Mario Kempes étincelant, était simplement au-dessus de son adversaire.
Les Péruviens jouèrent avec leurs armes, ne manquant jamais d’inquiéter Fillol.
Cubillas, son fer de lance, fut mis sous l’éteignoir par l’arrière-garde Argentine.
QUIROGA NE PUT ABSOLUMENT RIEN FAIRE SUR LES 6 BUTS ENCAISSES.
D’AILLEURS, AVANT LA RENCONTRE, RAMON PENSAIT MEME NE PAS JOUER CE MATCH ET SON ENTRAINEUR DUT INSISTER POUR QU’IL LE FASSE.
Son honneur bafoué, Ramon Quiroga dut s’expliquer dans une lettre adressée à la presse les jours suivants.
Lettre, qui succinctement disait ceci : « L’Argentine a gagné parce que c’est une équipe forte et qui nous a dominée pendant toute la rencontre.Le Pérou a joué avec le même engagement que dans les parties précédentes, mais il a trouvé en face de lui un adversaire qui avançait sans cesse et jouait le match de sa vie.Dites-moi QUELLE EQUIPE aurait pu leur résister ?
Je suis fier d’avoir obtenu la nationalité Péruvienne et que l’on m’ait témoigné la confiance suffisante pour garder les buts de la sélection. »
Oui, Ramon, fais fi des racontars de toutes sortes sur ton compte.
Ignore-les.
Relègue donc dans les limbes du silence le sceau de l’outrage apposé par les bien-pensants.
Reste ce gardien un peu « loco » qui, bas baissés, s’en va dire un p’tit bonjour à Lato, le Polonais, au milieu de terrain lors d’un certain Pologne-Pérou joué précédemment.
De toute façons, tu retrouveras ton honneur puisque 4 ans plus tard, tu garderas toujours les cages Péruviennes…et cette fois, c’est Lato et ses copains qui se régaleront…***
Le peuple Argentin pouvait festoyer toute la nuit, il allait disputer SA finale…mais çà, Les Folles de Mai s’en foutent éperdument… ****
* Barbosa, le gardien de but du Brésil fut considéré comme le principal responsable de la défaite au Maracana (1-2) en 1950, qui verra l’Uruguay devenir championne du monde.
Il traînera cela comme un boulet toute sa vie durant et ce jusqu'à sa mort en 2000.
** Daniel Passarella fut entraineur de l’Argentine lors du Mondial 1998. Il imposa une discipline de fer à son groupe.Signe de son despotisme, il demanda à ses joueurs …de porter le cheveu court !!! Sous prétexte que cela nuisait à leur concentration pendant un match, car trop occupés qu’ils étaient à se recoiffer…ce à quoi Diégo Maradona lui rétorqua que s’ils se grattaient les couilles, ils faudraient leur couper aussi ??
*** Lors de Pologne-Pérou (1-0), Lato l’attaquant Polonais s’échappa vers le but Péruvien…et trouva Quiroga venu à sa rencontre …au milieu de terrain, qui pour l’annihiler, le ceintura.
4 ans plus tard, lors d’une nouvelle confrontation entre les 2 pays au Mundial en Espagne, Lato lui marquera 1 but sur les 5 concédés ce jour-là par les Péruviens (Pologne-Pérou : 5-1)
**** Suite à la prise de pouvoir de la Junte militaire du Général Vidéla, une dictature s’instaure en Argentine.Pouvoir féroce, qui met fin à toute démocratie et abat sur le pays une répression brutale.Des pères de famille, des fils « disparaissent » du jour au lendemain.Les mères et les femmes des disparus manifesteront toutes les semaines sur la place de Mai, à Buenos Aires, en réclamant la vérité sur leur sort…Magnifique et ô combien pathétique combat contre l’asservissement d’un peuple…