sex foot rock'n'roll
Interview d'André Guesdon Version imprimable Suggérer par mail
Écrit par shogun   
16-02-2010
Notre reporter spécial en Armorique "Shogun" a recontré André Guesdon et a évoqué avec lui sa longue et belle carrière passée par entre autre  Monaco, Bastia,  Bordeaux ou Nice.avec plaisir ! j'espère qu'on se reverra ...


1. Ton début de carrière :
André Guesdon: Je suis originaire de Caen et en minimes je jouais aux PTT de Caen mais j'ai très vite rejoint le Stade Malherbe jusqu'à mes 21 ans. Là, je continuais mes études, en anglais, tout en évoluant en CFA de l'époque ... on jouait contre Brest, Quimper, Lorient. C'était la fin des années 60-début 70. Là, j'ai été contacté par Sedan mais je ne pouvais y suivre mon cursus universitaire et j'ai donc choisi Monaco. J'ai continué, un peu, mes études à Nice mais très vite, je me suis consacré au foot à 100% ...

2. L'AS Monaco :
AG: J'y suis arrivé l'année du contrat à temps et j'y ai signé pour 5 ans. C'était lors de la saison 71-72 et c'était super pour moi d'intégrer un club pro. J'y ai joué avec Loulou Floc'h, Montes, Pastorizza, Dalger, Jean Petit ... au début, c'était difficile pour moi, je souffrais de la chaleur et j'ai eu beaucoup de mal à m'adapter. Pas évident pour un Normand comme moi ! Monaco était alors un petit club, bien qu'ayant rapporté la Coupe et le Championnat dans les années 60. Il n'y avait pas de public et on tournait avec des assistances de 1500 à 2000 personnes, pas évident pour la motivation. Là-bas, j'ai disputé la finale de la Coupe 74 que l'on a perdu face à l'ASSE. J'ai débuté en pro quand Quittet s'est blessé : je jouais soit stoppeur, soit libéro.

3. Quels attaquants t'ont le plus impressionné ?
AG: Sans conteste, Josip Skoblar ! c'était le plus fort. Lui, c'était la grande classe : chambreur, doué, complet, bagarreur et aussi un magnifique buteur. Carlos Bianchi et Hervé Revelli m'ont aussi donné du fil à retordre. Et puis, mon coéquipier Onnis, un grand et superbe attaquant ....

4. Comment es-tu arrivé à Bastia ?
AG: Je me suis blessé à la cheville et j'ai été opéré. J'ai perdu ma place de titulaire et je suis donc parti en 1976.

5. Alors, Bastia ?
AG: C'était extraordinaire. On n'avait pas de moyens, des conditions d'entrainement sommaires mais l'ambiance était superbe ! on s'entrainait sur le terrain principal entre la ligne de touche et les tribunes pour ne pas abimer la pelouse. C'est Jules Filippi, notre directeur sportif qui avait crée cette équipe avec des joueurs revanchards, des jeunes souvent prêtés et des stars. Y'avait là une belle mosaique avec des Corses ( Franceschetti, Marchioni, Orlanducci, Papi ... ), des Basques ( Cazes et Lacuesta ), des Alsaciens, des Yougoslaves. Chacun avait de fortes personnalités. Les Corses, eux, étaient fidèles à leur club et ce maillot.

6. Et cette épopée de 1978 ?
AG: Le déclic s'est fait à Lisbonne. On gagne à l'aller. Au retour, personne n'y croyait et on avait négocié une forte prime de qualification car même les dirigeants n'y croyaient pas. Je me souviens d'Orlanducci qui n'arrêtait pas de monter. Puis, il y eut Newcastle, Iena, Zurich, Torino ... On a subi à Zurich notre 1ère défaite face aux Grasshoppers ! et le 7-2 face à Iena !!!!

7. Quel match t'a le plus marqué ?
AG:  Torino, sans conteste ! y'avait de grands joueurs en face ... notre public était venu en masse car ce n'était pas loin. Y'avait du brouillard, de la neige. J'avais Graziani au marquage ! le but de Krimau fut une délivrance... à notre retour, l'avion n'a pas pu se poser, les gens étaient sur la piste. Il nous a fallu 2 heures pour rejoindre la ville et arrivé chez moi, tous mes voisins m'y attendaient !!!

8. Quel état d'esprit avait cette équipe ?
AG: Des copains, de l'amitié et un super coach ...

9. Pierre Cahuzac ?
AG: Il te faisait confiance. Moi, je n'avais pas le droit de dépasser la ligne médiane. C'était frustrant car je voyais Charles qui montait et moi, je devais rester derrière ... Cahuzac était rustre mais il aimait ses joueurs. Il ne voulait pas le montrer, c'est tout ! c'était un personnage, à l'ancienne école. Quand je suis arrivé, en cours de saison, à Bastia, il m'a pris en tête à tête. Il m'a fait travailler mon physique seul : j'allais sur la ligne de but, lui aux 16m, il me balançait des ballons, à droite, à gauche que je devais sortir sans les mains ! je finissais "lessivé" !
il lui arrivait même de faire des 1 contre 1 sur la totalité du terrain. L'entrainement était fort en début de semaine, puis, c'était les jeux et le ballon ! Je suis content que l'un de ses petit-fils joue aujourd'hui à Bastia en L2. Je l'ai vu quand on y est allé avec Brest.

10. Claude Papi ...
AG: l nous faisait gagner les matchs ! j'ai rarement vu un tel mec : aisance technique, simplicité et fort sur coup-franc. Il n'a jamais voulu quitter Bastia malgré des propositions. Il aimait le foot et la chasse ! il a joué un match de Coupe du Monde en Argentine, face à la Hongrie mais il aurait mérité plus de reconnaissance. C'est l'un des meilleurs joueurs que j'ai vu dans ma carrière ....

11. Et le mythe Furiani, André ?
AG: Personne ne gagnait là-bas. En 1977, quand nous avons fini 3è, on n'y a pas perdu un seul match ! y'avait une légende autour de ce stade ...

12. Pas seulement une légende, non ?
AG: isons que c'était chaud ! j'y ai connu des envahissements de terrain, des CRS pour ramener les visiteurs. Nos supporters allaient à l'hôtel empêcher nos adversaires de dormir ! ! et puis, y'avait cette ambiance corse avec les bombes agricoles qui explosaient dans le stade. La fibre corse se reflétaient sur le terrain. On avait une grosse qualité de joueurs mais aussi, on savait se faire respecter.

13. Pas un peu trop d'ailleurs ?
AG: 'un de mes premiers matchs en pro, j'ai affronté, à Nimes, Charles-Alfred. Dès le début du match, il m'a dit : " tu rentres pas dans la surface, petit ! sinon, je te casse la jambe ...". Ca impressionne ...
à cette époque européenne, l'île entière vivait pour le football. Nous, les joueurs, on était invité à des mariages, des enterrements et là-bas, je peux te dire, un enterrement, c'est quelque chose. On était beaucoup sollicités mais on en était fiers ! on était les porte-drapeaux de la Corse . J'y ai gardé beaucoup d'amis là-bas !

14. Vous revoyez-vous ?
AG: Je revois souvent Pierrick Hiard qui est à Rennes. J'ai souvent Charles Orlanducci, Paul Marchioni. On s'est revus pour le jubilé des 20 ans de la Coupe UEFA. Presque tout le monde est venu, c'était super ...

15. Comment étais-tu accueilli losrque tu es revenu jouer avec Nice ?
AG: Avec des fleurs avant le match, super bien après le match. Mais pendant, c'était : "on va te "tuer", pas de cadeaux " ! c'est ça Bastia ...

16. Quelle était la force de cette équipe ?
AG: Un gros mental, une camaraderie. On était hyper soudé. On se "frappait" parfois à l'entrainement mais on défendait, avec fierté, ce maillot. Et puis, en Corse, tu as une superbe qualité de vie. Il fait toujours, ou presque, beau. Les gens sont supers, c'est une terre d'accueil. Ils te donnent tout si tu es réglo avec eux. Les Corses quand ils acceptent quelqu'un, c'est pour la vie ...

17. Johnny Rep ?
AG: Il n'aurait jamais dû venir à Bastia ! Jules Filippi lui a fait croire que Furiani était le terrain annexe .... J'étais en chambre avec lui. C'est quelqu'un d'exceptionnel, une grande star. Il avait une grosse facilité physique. A l'entrainement, il nous "torchait", un monstre physique ! Je n'ai jamais revu une frappe comme lui : il tirait sans armer son tir. De plus, il n'avait peur de rien. C'était un fêtard, un bon vivant. Très vite, il est rentré dans le moule de l'équipe, de l'île, des us et coutumes : il s'est vraiment éclaté en Corse ... Un type extra !

18. Des regrets sur la finale ?

AG: Sur le match aller : il n'aurait pas dû avoir lieu, le terrain était impraticable. Y'avait des mares, le ballon bloquait dans la boue ! officiellement, y'avait 8000 personnes mais là, c'était fou ... Dans des conditions normales, on le gagnait ce match, rien ne pouvait nous arrêter ... au retour, on était cuits physiquement ! de plus, on avait joué, quelques jours auparavant, une demi-finale de Coupe. Le match aller nous a tué ...

19. Quand je pense à cette équipe, je pense aussi à "la roulette à Mariot"!
AG: C''est venu comme cela ! il avait décidé d'en faire une à chaque match, c'était un rituel ! t'imagines la tête du gars qui le marquait : il savait qu'à un moment, il allait se prendre une roulette et il ne pouvait rien y faire ! ... Il la faisait, le plus souvent, quand il était du côté de sa frange de supporters, dans un coin. Il ne la répétait pas à l'entrainement, c'était en lui ! je n'ai jamais vu, quelqu'un, refaire ce geste dans un match ...

20. Ensuite, tu pars à Bordeaux ?

AG: J'y suis resté 3 mois. Je n'avais pas de feeling avec Carniglia, l'entraineur argentin. Pourtant, on avait une belle équipe avec Bergeroo, Toko, Gallice, Giresse, Rohr, Ferri ... mais ça ne collait pas ! Katalinski, à Nice, s'est blessé. On m'a demandé de venir le remplacer, j'ai dit oui ....

21. Et Nice, alors ?

AG: On avait une super équipe avec Bjekovic ( super joueur ), Guillou ( la classe ), Sanchez, Curbelo ... mais on y jouait le maintien ! l'équipe manquait de régularité et d'équilibre. On avait raté notre début de championnat. J'ai un sentiment mitigé sur mes années niçoises : gros potentiel mais décevant. Pourtant, c'est une ville de foot avec un public chaud. Chaud mais qui avait du mal à te soutenir quand ça allait mal et qui était très versatile.

22. Là, tu arrives en fin de carrière ...
AG: Oui, j'ai 33 ans et en 81, Markovic me propose de prendre la direction du centre de formation de Nice. J'étais ok. Je refuse des propositions de clubs de D1 et D2 pour m'y investir. Hélas, le président me fait un "râteau" et je me retrouve le bec dans l'eau en juillet ! pas de club ...

23. Alors ?
AG: Un copain me trouve une équipe de PH près de Toulon. Je deviens entraineur-joueur et, en même temps, employé municipal. J'étais au boulot la journée et, le soir, j'entrainais jusque 22h, toutes les équipes du club. Harassant ! Ensuite, je suis allé au Canet, toujours en PH et j'ai passé mes diplômes d'entraineur ...

24. Tu décides de devenir entraineur ?
AG: Oui, à Viry-Chatillon en D3 où je suis resté 7 ans dans un club structuré, avec des éducateurs. Un bon club de la Région Parisienne ... Puis, Angers me contacte pour son centre de formation et je file là-bas ...

25. Ta carrière d'entraineur ....
AG: Je suis resté 9 ans à Angers et, à 2 reprises ( après Alain de Martigny et Bruno Steck ), j'ai pris en charge l'équipe A. La 1ère fois, ce n'était qu'un intérim et je suis retourné ensuite à la B. La seconde, le club descendait en National, on est reparti avec des jeunes dont Ramé et on a fini 2è derrière Sedan. Les dirigeants n'ont pas voulu continuer avec moi et là, je suis resté 1 an au chômage.

26. Tu as rebondi ?
AG: Oui, à Chateauroux au centre de formation ! j'ai bossé avec Joel Bats et Thierry Froger pendant 2 ans et demi. Ca a "clashé" parce qu'avec Joel Bats, en B, on faisait jouer ceux qui vraiment voulaient jouer et on se passait de certaines "vedettes". Les pros devaient être des exemples, ce qu'ils n'étaient pas tous ! les dirigeants ne l'ont pas compris et on est parti ....
là, retour à Bastia, toujours au centre de formation mais bon, c'était compliqué en terme de structures ! on nous avait promis un projet qui ne veanit pas, et qui n'est d'ailleurs jamais venu et c'était difficile. Je n'ai pas renouvelé mon contrat.

27. Puis ?
AG: Je suis parti à la cellule de recrutement de Monaco avec Didier Deschamps. J'allais superviser des joueurs mais que des stars ! c'était la grande époque monégasque ....

28. Didier Deschamps ?
AG: Un Monsieur ! super mec .... Sa carrière, son palmarès et pourtant un mec super simple. Il connait super bien le foot, pro, un exemple ! Il peut réussir partout même à Marseille .... après, y'a les dirigeants et quand tu es entraineur, tu dépends beaucoup d'eux ! j'ai beaucoup de respect pour Didier ... Quand je supervisais des joueurs, je faisais un rapport à Didier et c'était très fort de parler ainsi avec lui. J'espère qu'il réussira à Marseille ...

29. Et l'équipe de France ?
AG: J'ai joué en EDF universitaires avec Alain de Martigny, Dropsy ... en Amateurs quand j'étais à Caen ... en Espoirs et pré-sélectionné dans les 40 avant la Coupe du Monde 78 ! je n'en veux pas à Hidalgo d'avoir préféré Trésor ... A propos de Trésor, justement, j'ai une anecdote au sujet de Marius. On était en stage à Dinard-Saint Malo avec Stefan Kovacs et Georges Boulogne. Ils avaient prévu un match A contre Espoirs. Ce match devait servir à bâtir un groupe A. Ils m'ont fait jouer arrière-droit ( c'est la 1ère fois que j'évoluais à ce poste ) et en plus face à Charly Loubet ...

30. Et alors ?
AG: Henri Guérin m'a dit qu'ils voulaient me voir à cette place-là ... en libéro, mon poste, ils avaient choisi Marius ! après, on connait la suite ... et moi, je n'ai jamais évolué en A chez les Bleus ! mais, je ne regrette pas ....

31. Une dernière question, André : la différence entre "ton" foot et celui que tu voies aujourd'hui ?
AG: Pas beaucoup de différences ! des très bons joueurs, les "furioclasse", il en existera toujours que ce soit Zidane ou Platini ! maintenant, le foot est le reflet de la société avec ses bons et ses mauvais côtés. Chez les jeunes, on ne dit plus bonjour mais c'est des signes ... peut-être que de notre temps, y'avait plus d'amitiés, de liens entre les joueurs ! ah si : aujourd'hui, dans le foot, il y a de plus en plus de gens qui ne sont pas là pour le football mais pour le business. Toi, moi, nous sommes des amoureux du foot mais eux ?

32. Et les supporters ?

AG: Les phénomènes "ultras" ou "clubs de supporters" existaient déjà dans les années 70-80. C'était chaud aussi avec des bagarres dans les stades mais c'était moins médiatisé.

En tous cas, merci André pour ta gentillesse, ta simplicité, ton amour du foot. On a pris énormément de plaisir à réévoquer avec toi ce foot des années 70-80 qui reste, pour nous, un grand souvenir.

AG: Moi aussi, j'ai pris beaucoup de plaisir à replonger dans mes souvenirs. Ca fait du bien de se souvenir de certains, de matchs, de clubs ... n'hésitez pas à me recontacter au besoin, ce sera
Dernière mise à jour : ( 14-10-2010 )
 
< Précédent   Suivant >
Twitter
© 2024 Foot Nostalgie