Entretien avec Philippe Mahut
Écrit par gaoutte   
26-03-2007
Plus de 500 matchs professionnels, 9 sélections en équipe de France dont un match France - Pologne pour la 3ème place de la Coupe du Monde 1982, deux titres de champion de D2 comme unique palmarès. Voici le parcours étonnant de Philippe Mahut qui a reçu chez lui à Fontainebleau notre envoyé spécial Gaoutte.

Joueur emblématique pour les amoureux de la nostalgie et redoutable défenseur central. C’est un homme très sollicité, pourtant très à l’écoute, travailleur et discret. Des qualités que l’on retrouvait lorsqu’il foulait les pelouses de l’Hexagone.
Philippe m’a accueilli très chaleureusement à son domicile, me consacrant plusieurs heures de son précieux temps. Dans son salon, au milieu de ses toiles (une passion qu’il a peu le temps d’exercer), accroché le maillot que portait Thierry Henry lors de la finale de la Coupe du Monde 2006 ! Emotion.
Dorénavant, il gère une agence MMA à une dizaine de kilomètres de la belle cité bellifontaine, ou il occupe également des fonctions au sein de la mairie.
Au-delà du temps passé il a pour nous remué ses anciens souvenirs et dépoussiéré ses albums photos. Il a également ouvert sa double valise de maillots, dont il a retiré et offert gracieusement 1 maillot et 1 coupe vent.
Il a même, sous mes yeux, manqué un appel téléphonique de Lilian Thuram…

NOM : MAHUT
Prénom : Philippe.
Taille : 1,79
Poids : 69 Kilos.
Lieu de naissance : Rosières
Situation : Marié en 1979, 2 enfants.
Surnom dans le monde du Football : Caliméro ou Maya (l’abeille), pseudo donné par son compagnon de chambrée à l’époque de Metz, Cheikh Diallo du fait de ses choix télévisuels du samedi, avant match.

Philippe Mahut à Fontainebleau


Doté d’un très bon jeu de tête et d’une impressionnante détente, Philippe Mahut a gravi rapidement les échelons qui l’ont amené au professionnalisme. Assez rapide, vif, dynamique il pêcha seulement par quelques relances que certains jugeront « approximatives » mais surtout par un manque de confiance en lui. Faiblesse que l’on décèle encore aujourd’hui lorsqu’il nous glisse « je ne me sentais pas capable… »

Les Souvenirs :

Comment êtes vous venu au football ?
J’ai grandi à Rosières, petit village du Cher, élevé par ma grand-mère. Là haut, les activités ne sont pas nombreuses hormis le football et le vélo. Mon père était un joueur amateur de très bon niveau et puis j’avais quelques dispositions pour la pratique de ce sport… J’ai d’abord joué en benjamin à l’AS Montferrand puis j’ai suivi mon oncle qui s’est installé à Fontainebleau. Alors que j’effectuais mon service militaire au Bataillon de Joinville dans le Sud de la Seine-et-Marne, un recruteur troyen, André Watrin m’a approché. Etrangement, je l’ai retrouvé des années plus tard, lors de mon transfert au FC Metz.

Aviez-vous une idole de jeunesse ?
Pelé tout d’abord et Johan Cruyff … et puis Neeskens ! La grande époque de l’Ajax fut formidable…

Quel est votre premier souvenir en tant qu’amateur de football ?
La venue du Nantes d’Henri Michel à Fontainebleau, lors d’un match amical. Nantes évoluait alors en D1 et l’Entente en D2. Henri Michel est un joueur que j’adorais.

Quel est votre premier souvenir en tant que joueur de football ?
Une rencontre à l’âge de 18 ans, contre le RC Strasbourg. J’étais au marquage de l’avant-centre camerounais Joseph. Un monstre physique aux cuisses démesurées.

Quel est votre 1er souvenir en tant que joueur professionnel ?
Un match Troyes – Angers avec Marc Berdoll en attaque. J’avais pallié à l’absence d’un joueur blessé … et j’ai fini la saison titulaire.


Le championnat de France :

Parcours en D1 / D2 Française:
Fontainebleau (1974-1976)
Troyes Aube Football (1976-1978)
FC Metz (1978-1982)
AS Saint Etienne (1982-1984)
RC Paris (1984-1986)
Matra Racing (1986-1988)
Stade de Quimper (1988-1989)
Le Havre AC (1989-1993)

Licence Stade Quimpérois

 
Quelles saisons vous inspirent particulièrement de bons souvenirs ?
Il serait plus facile de répondre qu’hormis ma seconde année à Troyes et ma quatrième année à Paris, je n’ai que des bons souvenirs !

Qu’avez-vous gardé de votre première expérience de D1 au TAF de 1976 à 1978 ?
Un GROS souvenir. Dans un premier temps, certaines difficultés à s’acclimater du fait que je m’y rendais uniquement les week-ends après le Bataillon de Joinville, puis le centre de formation, et en septembre 1976 une chance m’a été donnée. Robert Jacques se blesse en équipe première puis je réussis un bon tournoi à Lille. Je conserve donc la confiance de mon entraîneur René Cédolin, tout en intégrant le groupe uniquement 2 jours par semaine. Je passe donc très soudainement du statut de stagiaire à celui de professionnel enchaînant les entraînements aussi bien à l’Armée que dans l’Aube. J’effectue une progression rapide et franchis alors un palier énorme… mais je le paierai l’année d’après enchaînant des performances que je juge catastrophiques. En 77-78 donc, seuls deux matchs demeureront particulièrement réussis pour moi : 2 rencontres contre Metz ou je suis au marquage du redoutable argentin d’Hugo Curioni… Même si Troyes descend à la fin de cette même année, un seul club m’a repéré. Il s’agit du FC Metz.

A Metz, justement vous êtes promu capitaine à 25 ans. L’effectif y est très jeune …

Enfin la 1ere saison, il y a un effectif confirmé (tous trentenaires)… Metz est leader après 3 ou 4 journées et je ne me souviens plus comment je me suis imposé. Par contre, les 3 années suivantes l’effectif est renouvelé et Metz fait beaucoup appel aux jeunes générations (20/25ans) comme Bracigliano, Souto, Etorre, Battiston. Avant d’être une équipe de foot professionnel on était une équipe de copains, insouciants…

Et vous connaissez une progression très rapide sous la direction d’Henry Kasperczak. Avez-vous le sentiment que c’est cet entraîneur qui vous a le plus fait progressé ?
Hof, TOUS les entraîneurs m’ont fait progresser. Chacun avec sa personnalité et ses méthodes. Au début il jouait même sur le terrain et nous nous apprécions mutuellement. Les origines polonaises communes peut-être. Kasperczak a apporté une rigueur qui n’existait pas avant et avait une véritable carrure d’entraîneur !

Philippe Mahut à Metz


Philippe Mahut à Metz



Les présidents :

Vous avez côtoyé   des présidents différents au long de votre carrière, quelles différences avez-vous constaté entre la gestion d’un Molinari, André Laurent,  Hureau, Lagardère ?
Très grosses différences entre tous, mais tous passionnés de football. Disons que Molinari, Hureau faisaient partis du groupe. A la différence de Lagardère qui déléguait beaucoup mais qui est un homme pour qui j’ai le plus grand respect.

Quels souvenirs gardez vous de vos deux saisons stéphanoises, sachant que vous avez joué à un moment difficile pour le club (ère post-Platoche, affaire de la caisse noire, etc.).
Je découvre un club au top que je rejoins durant l’été 1982. Je devais aller à Toulouse, tout était conclu mais au dernier moment Saint Etienne qui avait engagé le jeune Millot pour remplacer Piazza ont fait appel à moi. Le transfert est de l’ordre de 2 Millions de Francs (somme énorme à l’époque pour un défenseur)

C’est un club au top dans le « professionnalisme » : déplacement en avion pour le moindre truc, installations extraordinaires, staff médical très important.
Malheureusement, c’est une période tendue, charnière. Pas mal d’entraîneurs, de présidents… Robert Herbin fut entraîneur et demeure un personnage hors norme que j’ai beaucoup aimé. A la différence du public, qui le sifflait. Il a eu un courage énorme de travailler aussi longtemps dans un contexte aussi impossible. C’est dommage car ce stade, cette ville, qui vibre au milieu de ces usines, cette ambiance « ouvrière » est absolument fa-bu-leuse. Je n’ai aucun souvenir que les joueurs aient été contestés. Les dirigeants oui, mais les joueurs eux étaient adorés. Dans la ville impossible de se balader. Ils reconnaissaient leurs joueurs partout… Cette communion entre le public et ses joueurs, je ne l’ai jamais revécu.                                                     

A l’époque, comment se passaient les transferts ? Aviez-vous un agent ? Comment étiez-vous contacté par d’autres clubs ? Sur quels critères avez-vous choisi de partir vers tel ou tel club ?
Non, j’ai eu un agent à Metz pour la Coupe du monde 82 mais ça s’est mal passé. A la seconde saison à Saint Etienne, je m’estimais trahi car malgré les objectifs (dans les 3 premiers) et les internationaux nous perdons les barrages et descendons … j’ai donc décidé de rejoindre Paris.

Arrivé au Matra vous êtes au cœur d’une aventure qui s’annonce prometteuse. Sous la direction de Sylvester Takac, vous faites partie de l’équipe qui monte en D1, la saison suivante, vous avez comme partenaire d’entraînement Tusseau, Bossis, Fernandez, Littbarski et Francescoli… On se demande encore comment cette équipe n’a pu obtenir plus de résultats.
Le Matra avait super bien commencé et puis nous sommes partis faire un stage d’un mois au Maroc, très très dur physiquement. Pour moi comme pour d’autre il fut de trop. Le groupe a explosé, nous étions à la rue.
Je n’étais pas un « foncier » à la différence de Bruno Germain ou Bossis. Et puis, Artur Jorge, était un entraîneur spécial au sens ou il mettait une distance… parfois nous ne le voyions pas durant une semaine. Un peu une méthode Wenger avant l’heure, développé dans le football actuel qui veut que la préparation de chaque joueur soit spécifique (entraînement individualisé).
La méthode Artur Jorge ne me convenait pas, car les rapports humains représentent un point nécessaire dans ma préparation. Ca manquait d’homogénéité.
 
En faisant le bilan, que retirez-vous de cette expérience ?
Nous n’étions pas un club aimé car construit à base de millions. Ce n’était pas l’amour du Racing d’antan. Je pense qu’il est et qu’il sera toujours très difficile de construire une grande équipe à Paris.

Le Matra Racing


Vous êtes parfois buteur, et vous allez même jusqu'à inscrire 10 buts lors de l’exercice 85-86 avec le Matra !
C’est une année en D2 ou le Racing marchait relativement bien. Une année où j’avais la réussite, une confiance en moi et où j’étais euphorique. Au niveau au dessus, j’aurais sûrement bien marché également. C’est l’année de mes 28 ans où je me sentais vraiment bien.

Quelques uns de vos buts vous ont particulièrement marqué lors de votre carrière ?

Je devrais mais non. Un doublé à Orléans. Un joli contre Laval …

Aviez-vous un stade « préféré » ? (Un stade ou vous évoluez avec d’avantage de plaisir, qui vous réussissez)
Sans hésitation : Saint Etienne !!! Le foot comme on devrait le voir partout.
Lens c’est le même (niveau émotion) mais bizarrement je n’ai pas souvenir d’avoir gagné un match là-haut.

Juillet 1982 au Stadium de Villeneuve d'Ascq avec le maillot de l'ASSE


Quels joueurs furent les plus durs à marquer ?
Ca, cela dépend de chacun. Pour ma part, j’ai souvenir de Delio Onnis, un joueur qui courrait peu, facile à marquer, mais qui avait un sens du placement i-né-ga-la-ble ! Un renard ! Toujours là, ou il faut…un cauchemar pour les défenseurs… Déjà avant le match on était diminué psychologiquement à hauteur d’environ 30% de ses capacités.
Sinon, j’avais quelques difficultés avec les petits gabarits vifs, genre Bernard Lacombe. J’ai de mauvais souvenirs également de Nenad Bjekovic, Bianchi et d’Umpierrez
Mais l’état de forme joue beaucoup…

Avez-vous déjà reçu des injures venant du public qui vous ont blessé ?
Non, quelques sifflets à l’extérieur. Rien de blessant.

Avez-vous déjà reçu des cartons rouges dans votre carrière ?
J’aimais les contacts mais je veillais toujours à être correct. Je n’ai donc pas le souvenir d’avoir reçu beaucoup d’expulsions…Ah si, une fois lors d’un match contre Monaco. Une erreur de jeunesse…On se cherche durant tout le match, avec le latéral monégasque Liégeon. Je joue la comédie et au final l’arbitre nous sort tous les deux. …

Un départ à l’étranger ne vous à t-il jamais tenté ? Pourquoi n’y être jamais allé ?
J’ai eu des touches avec Mönchengladbach mais j’étais trop jeune à l’époque (21 ans) et je ne me sentais pas capable de jouer en Allemagne. Je ne le regrette pas.

Avez-vous des regrets ?
(Déterminé) Aucun !!!
Il y eu certes un contexte difficile à Saint Etienne qui m’a peut-être empêche de m’exprimer pleinement en équipe de France alors qu’une carrière internationale semblait s’annoncer. Un challenge à Paris alors que j’aurais souhaité rester d’avantage dans le Forez. De toute manière, je considère, que pour réussir dans ce métier il faut avoir un peu de chance. J’ai assez bien réussi.

Quelle est votre plus grande fierté personnelle ou professionnelle ?
Aucune fierté !  Ce n’est pas de la fierté ! C’est du bonheur. Je viens d’un milieu modeste, famille polonaise, destiné à être ouvrier peut-être ou prof de gym comme je l’espérais. Jamais je n’ai eu l’idée que je pouvais atteindre le niveau pro ! Jamais ! Jamais !

Gardez-vous des contacts avec d’anciens coéquipiers ?
J’ai énormément de contacts dans le football encore, à l’heure actuelle. Il est difficile d’établir une liste mais des véritables « amis » oui ! Je garde des contacts très réguliers avec le groupe messin : Philippe Hinschberger, José Souto avec qui nous partions même en vacances. Castaneda, Bracigliano, j’en oublie …

A l’inverse, êtes vous brouillé avec certaines personnes du milieu footballistique ?
Oui, il y a 2 ou 3 personnes avec qui j’ai eu des brouilles (il me cite les noms) mais cette question est sans intérêt.

Matchs mémorables ?
Le match de la Pologne, (2-3) mon meilleur souvenir forcément. J’ai vu le match à la télé il y a 4-5 mois bizarrement. Le physique des joueurs actuels et la manière dont c’est filmé rendent vraiment l’impression que nous avancions à « 2 à l’heure. »
Sinon, la demi-Finale contre l’Allemagne même si je n’y participe pas. J’ai vu pour la 1ere fois, la fin de cet événement il y a 7/8 ans car étant très ami avec Battiston, j’étais au téléphone avec sa femme, sous le stade pour la tenir informé de l’état de Patrick.
Mon premier (Troyes - Angers)
Mon dernier (Le Havre - Auxerre)
Un match avec le variété à Jéricho (ou l’on ne voit plus les lignes, gardes en mitraillettes…). On perd 1-0 ou peut-être nul 1-1…le lendemain le buteur était la star du pays, pour un match amical. C’est un grand souvenir.

Pires Matchs ?
Le Match Paris – Troyes ou je suis au marquage de Carlos Bianchi (Ndlr : le 14 octobre 1977)
Le match Bordeaux – Saint-Etienne ou l’on en prend 7 ou 8 (Ndlr : c’était le 31 mars 1984)

PSG - Troyes 1977



L’Equipe de France

25 ans après, quels souvenirs gardez-vous de vos 9 sélections en Equipe de France. Quelles anecdotes vous reste-t-il ? Les ambiances ? Les consignes du coach…
BELGIQUE-FRANCE (2-0), qualification pour la coupe du Monde le 9 septembre 1981
Associé à Lopez, vous faites votre possible pour contrecarrer les attaques de Czerniatynski, Ceulemans et Vandenbergh et Vercauteren à la baguette. Vous commettez une bévue lors du 1er match, vous en êtes vous longtemps voulu ?
Match bizarre. Nous étions en stage au Touquet et j’étais tellement euphorique que je me suis donné a fond aux entraînements… De même lors du match, j’avais tellement de jus et je voulais tellement montrer mes capacités que j’ai été moyen. Trop bien faire, ai gâché mon match. J’aurais du me tempérer pour une 1ère sélection. Mais je me souviens de 2-3 erreurs mais pas de bévues.
IRLANDE-FRANCE (3-2), qualification pour la coupe du Monde le 14 octobre 1981, match compliqué dans un contexte difficile. L’un de mes pires souvenirs…je n’ai pas été bon à ce match ! Je suis au marquage de Stapleton, genre d’avant-centre puissant sur terrain gras qui ne me réussit guère. Par contre je ne pense pas avoir été sélectionné au mauvais moment. Il n’y a pas de bon ou mauvais moment. Ce qui m’a sauvé c’est quand le sélectionneur a hésité entre moi et Specht pour le match de la Bulgarie où j’ai fait un bon match.
FRANCE-BULGARIE (0-0) le 14 mai 1982, un bon match mais toujours des difficultés à rentrer dans ce groupe. Ils représentaient pour moi des stars et je n’arrive pas à me libérer par manque de confiance probablement.
FRANCE-GALLES (0-1) 02 juin 1982 entrée à la mi-temps. Pas de grands souvenirs. En pleine coupe du monde… A la même période, une sélection contre un club espagnol qui n’a pas compté de mémoire.…
POLOGNE-FRANCE (3-2) Coupe du Monde le 10 juillet 1982 + ressenti sur toute la coupe du monde.
Mon meilleur sous le maillot tricolore et un grand souvenir.
FRANCE-POLOGNE (0-4) 31 août 1982. Match de bienfaisance à l’époque au Parc. Personne n’était réellement motivé par ces matchs là. Tout le monde reprenait le championnat…
FRANCE-HONGRIE (1-0) 06 octobre 1982. Pas de souvenirs particuliers.
PORTUGAL-FRANCE (0-3) 16 février 1983.  Super match contre un avant centre (Gomez)… bon souvenir. Ce qui démontre que j’ai été très irrégulier sur ma période.
FRANCE-U.R.S.S. (1-1) 23 mars 1983. Je n’ai pas été bon. Je ne trouve pas mon équilibre mais je ne pensais pas que c’était le dernier match (bien que l’on commençait à parler de Le Roux)

9 septembre 1981 : 1ère selection contre la Belgique


Après 9 capes et ayant été dans les 22 en Espagne, comment avez-vous vécu le fait de ne plus avoir la confiance d'Hidalgo...avec l'Euro 84 qui s'annonçait ?
C’est des choses sur lesquelles je n’aime pas trop revenir. Disons qu’à partir du moment où l’on est au plus haut niveau il faut s’attendre à être remplacé, bien que mon souhait était d’y rester le plus longtemps.

Bien que vous n’étiez pas toujours titulaire avec l’équipe de France, vous participiez tout de même à l’émulation du groupe, à l’ambiance…Quel est votre ressenti vis-à-vis de la sélection française ? Vos relations avec les joueurs ? Votre importance dans l'équipe et votre sentiment par rapport au sélectionneur ?
Mon intégration fut plutôt aisée et rapide … J’aurais peut être même pu jouer le match après l’Angleterre [Ndlr : 1er match de qualification WC 1982 (1-3), suivi du match contre la Tchécoslovaquie] mais Marius m’a blessé à l’arcade à l’entraînement. Ensuite, Janvion a réalisé une super Coupe du Monde avec le numéro 4.

Quel souvenir gardez-vous du match France - Pologne d'Alicante en 1982 où vous avez croisé la route de Boniek ?

Il n’y avait pas que Boniek, il y avait aussi 10 autres polonais et personnellement j’étais d’avantage concentré sur Szarmach, mon adversaire direct.

Avez-vous échangé votre maillot à la fin du match ?
Oui. Nous avions deux jeux de maillots. Celui-ci (il me montre celui de remplacement) et l’autre est dans une valise. C’est celui de Kupcewicz

L’avez-vous gardé ?
Oui.


Aujourd’hui :

Votre vie famille, s’est elle trouvée perturbée par les changements de résidence incessants ?
Non. On y est préparé et puis ces déplacements incessants sont plus faciles entre 20 et 35 que plus vieux. C’est sûrement l’une des raisons pour laquelle je n’ai pas insisté pour passer mes diplômes d’entraîneur. Pour les enfants c’est même plus une source d’enrichissement.

Supportez-vous une équipe à l’heure actuelle ?
Non, je regarde les matchs à la télé.  Je ne suis pas détaché non plus. J’aime suivre les résultats des clubs ou j’ai évolué ainsi que ceux des équipes entraînées par les copains : le Lille de Puel, les Chamois de Philippe (Hinschberger).

Vous m’avez confié tout à l’heure suivre toujours l’actualité footballistique française et européenne. Voici l’extrait d’une interview paru dans le journal France Football de 1992 où vous déclariez « Il y a tellement de fric en jeu que la loyauté n’est quasiment plus possible. Presque 15 ans après, quel regard jetez-vous sur le football actuel et l’omniprésence du football-business ?
C’était à l’époque pré-affaire OM-VA. L’on subodorait les dérives de l’argent… mais bien que j’assume cette phrase, je la regrette. L’affaire OM-VA a fait beaucoup de bien dans l’assainissement du football.

Que pensez-vous de l’arrêt Bosman ? Est-ce une avancée ou une régression ?
C’est une bonne chose pour les joueurs. Il me semble normal qu’ils touchent le maximum d’argent de leur transfert. Leur carrière ne dure que 10 ans. Ce sont eux qui offrent le spectacle et font vivre les clubs, et non pas le contraire.

Je vous sais assez admiratif du football pratiqué par l’Olympique Lyonnais, Avez-vous acheté des actions de l’Olympique Lyonnais ?
Non.

Toujours dans la même interview vous déclariez avoir bien gagné votre vie. Aujourd’hui si vous étiez joueur vous auriez sûrement gagné le triple ou le quadruple…Avez-vous la sensation d’avoir pratiqué le même métier, dans le même milieu, que celui des footballeurs actuels ?
Oui oui oui !  Il ne faut avoir aucun regret là dedans … la question eut été la même pour les générations précédentes. C’est l’évolution, on n’y peut rien… (Ndlr : il m’expliquera sa vision en détail, puis préféra se réserver, tronquant la réponse lors de l’interview, concluant sur le fait que « le talent a un prix… »).

L’arbitrage aujourd’hui, qu’en pensez-vous ?
Je les plains  !!! C’est si difficile, même nous, en temps que joueurs, nous ne savons pas si il y a ou non hors-jeu. De plus, les enjeux sont croissants ! Désormais la pression qui repose sur les épaules d’un arbitre est invraisemblable.
 
Quel remède peut-on préconiser ? La vidéo ?
Je pense que la vidéo peut effectivement être un bon moyen sur certaines zones (surface de réparation), mais pas plus. Cela soulagerait les arbitres. Pourquoi pas un système comme dans le tennis avec le recours 2 ou 3 fois à la vidéo dans le match.

Que pensez-vous de la démarche de Foot Nostalgie qui a pour but de se remémorer le passé d’un football datant de plusieurs dizaines d’années ?
Ponctuellement c’est bien. Ca permet de se rappeler plein de bons souvenirs.

Vous n’avez pas quitté définitivement le football même si aujourd’hui vous tenez une agence d’assurance dans le sud de la Seine et Marne. En effet, vous rechaussez les crampons avec le Variété régulièrement. Le plaisir est-il toujours intact ?
Quand on joue contre des gens de notre génération, ouais le plaisir est vraiment intact ! Quand on joue contre des beaucoup plus jeunes, maintenant on n’a plus le répondant comme à l’époque.

Etes-vous contacté par la fédération ou invité à participer à d’autres manifestations (matchs de l’équipe de France par ex) ?
Non, mais je ne leur reproche pas. J’ai quitté le milieu. Je n’ai aucun passe droit vis-à-vis de la Fédé parce que j’ai été footballeur professionnel. Cela vient peut-être de mon tempérament mais j’ai l’impression de ne rien devoir à la Fédé, comme celle-ci n’a rien à me devoir.

Avez-vous le sentiment qu’en France, on possède une mémoire du foot vis-à-vis des joueurs qui ont marqué le football français ?
Ouais relativement… grâce à Internet. Maintenant, lorsqu’on a été star on reparle de vous régulièrement alors que dans le passé, hormis Kopa… vous tombiez aux oubliettes.

Philippe Mahut capitaine du HAC

 

Questionnaires à  Réponses rapides : Votre regard, votre avis !

2-3 mots/souvenirs à propos de :

-Littbarski : gentillesse ,classe ,un copain de tennis pour qui j’avais beaucoup d’admiration.
- Rep : Fait partie des grands messieurs du football. La pure classe… Je sais qu’il entraînait il y a deux ou 3 ans une équipe de D2 ou D3 en Hollande

- Ibrahim Ba : un talent gâché, une carrière gâchée. Vraiment dommage.

- Paganelli : Sympa, nature, bohème.

- Kabongo : Footballeur étonnant. Pas « doué » mais buteur exceptionnel !

- Polaniok : Titi parisien, gentil, chambreur… un type adorable!!

- Madjer : Techniquement hyper doué.

- Micciche : Pas beaucoup connu. Mal conseillé. Est revenu à Forbach il y a quelques temps, non ?

- Sonor : Je l’apprécie beaucoup et je sais également qu’il m’apprécie beaucoup. De la même manière, je sais que ce respect mutuel est, entre autre, partagé par 2 autres défenseurs Teddy Bertin et Lilian Thuram.

- Francescoli : C’est la lignée Bossis, Rep, Littbarski. Le niveau mondial. … Au dessus niveau footballistique et mentalité. 

Selon vous :

Quels sont les 3 meilleurs joueurs à côté desquels vous avez évolué en club ? Platini… ah en club (réflexion) Rep, Francescoli, Littbarski !

Quels sont les 3 meilleurs joueurs que le football a connus ? (Mondialement) : Sans être original, j’en met 5 : Pelé, Maradona, Cruyff, Platini, Zidane.

Quels sont les 3 meilleurs joueurs du football français ?  : Platini, Zidane, ensuite Giresse ou Rocheteau.

Trésor ou Laurent Blanc ? J’adore les deux. Je ne peux les départager.

Zidane ou Platini ? Ah dur ! C’est pas les mêmes. Platini était plus efficace. C’est davantage un « patron », qui rayonnait sur les autres. Il marquait d’avantage. Mais la mentalité était moins collective qu’à l’époque de Zidane, qui lui est  plus spectaculaire. On ne peut pas comparer.

Bats ou Barthez ? Niveau classe les 2 se valent.

A quel joueur de football [époque nostalgique] associeriez-vous les adjectifs suivants ?

- calme ? Trésor.

- comique ? Desrousseau.

- excentrique ? Pas de réponse.

- surmédiatisé ? (Après réflexion) Ibrahim Ba. Trop vite montée médiatiquement. Vraiment dommage.

- sous médiatisés ? Philippe Hinschberger.

- charmeur ? Johnny Rep.

- barbu? Joël Tanter.

- dribbleur ? Magnusson fut très fort en son temps. Waddle sinon.

- simulateur ? J’en vois deux mais les noms m’échappent.

- moustachu ? Artur Jorge.

- infatigable ? Ali Ben Mabrouk.

- rapide ? Bernard Bureau.

- imprévisible ? Joël Tiéhi
Dernière mise à jour : ( 05-04-2007 )